Cartoprodig, des cartes pour comprendre le monde

Lettre de l'InSHS Sciences des territoires

#OUTILS DE LA RECHERCHE

Le laboratoire Prodig (UMR8586, CNRS / IRD / Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne / Université Paris-Cité / AgroParisTech) a lancé, en mars 2022, le site cartoprodig qui propose une collection originale de plus de 400 cartes à l’échelle du monde et des continents, exploitant plus de 60 indicateurs statistiques.

Pourquoi cartoprodig ?

Ce projet est né d’une idée simple : proposer, en accès libre, une large collection de cartes statistiques à l’échelle du monde, ce qui, curieusement, n’existait pas. Pourtant, les cartes sont partout, dans la presse, sur Internet, dans les publications scientifiques ou destinées au grand public. Ce mode d’expression nous est devenu familier et sa compréhension intuitive. Les succès éditoriaux des collections d’atlas confirment l’attente d’un large public pour ces visions à la fois synthétiques et détaillées des variations d’un phénomène dans l’espace, que ce soit à l’échelle du monde, d’un continent, d’une région. Parallèlement, de nombreuses organisations internationales (Banque mondiale, agences des Nations unies, Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, OCDE, entre autres) produisent régulièrement des statistiques, agrégées au niveau des États, sur un très grand nombre de thèmes, allant de l’éducation à l’économie, en passant par l’environnement, la santé, les migrations, etc. Si certaines d’entre elles doivent être considérées avec prudence, la plupart de ces données, librement accessibles, sont riches et utiles. Prises individuellement et comparées les unes aux autres, elles reflètent l’état du monde à un instant t, tout autant que les trajectoires des pays ou des continents sur plusieurs décennies. Fréquemment exploitées dans les rapports annuels ou thématiques des organismes qui les produisent, ces données sont également de précieuses sources pour les chercheurs et chercheuses, les experts et consultants, les enseignants et enseignantes. Mobilisées dans tous les atlas, elles ne font pourtant pas l’objet d’un traitement cartographique systématique. C’est ce que propose cartoprodig.

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Les émissions de CO2 dans le Monde (2018)
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L’espérance de vie en Europe (2014)

Un monde complexe, des cartes simples

Les indicateurs statistiques permettant de dresser un état du monde sont nombreux et leur lecture souvent ardue. Leur représentation cartographique les rend plus lisibles. Les cartes révèlent en effet plus efficacement qu’un tableau de chiffres les grandes inégalités du monde (entre pays des Nords et des Suds notamment) et les grandes dynamiques contemporaines (urbanisation, croissance démographique), ainsi que les différences, plus subtiles, mais très signifiantes, qui apparaissent au sein des continents. Certains indicateurs, peu intuitifs, révèlent leur force démonstrative dès lors qu’ils sont mis en carte, comme les émissions moyennes annuelles de CO2 par pays.

Les indicateurs de stocks sont cartographiés simplement, sous la forme de symboles proportionnels aux valeurs représentées, tandis que les indicateurs de taux sont représentés avec des dégradés colorés. Ils sont traités avec une même méthode qui découpe l’effectif statistique en six classes : quatre classes comptent le même nombre de pays ; deux classes extrêmes isolent les pays portant, d’un côté, les valeurs les plus basses, et de l’autre, les valeurs les plus hautes. Ce type de découpage, reposant sur un principe simple, est facile à interpréter et présente l’avantage de faciliter la comparaison entre des cartes traitant d’indicateurs différents. En complément, d’autres cartes sont proposées pour quelques indicateurs, avec des découpages en classes spécifiques, permettant notamment d’intégrer des valeurs repères (la moyenne, la médiane ou le zéro par exemple). Toutes les cartes sont réalisées avec l’application en ligne Magrit®, puis retravaillées une à une, à l’aide d’un logiciel de dessin pour leur mise en page (harmonisation des couleurs, habillage de la carte, ajustement des légendes), avec l’objectif de combiner précision, clarté et esthétisme.

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Comment lire nos cartes

Des cartes accessibles

Cartoprodig s’adresse à un public varié et international (les textes sont écrits en trois langues), qui a besoin de cartes pour illustrer un propos ou faire le point sur une situation mesurable à travers un indicateur statistique. Le site ne propose pas d’interface permettant de faire ses propres cartes en sélectionnant des indicateurs, des modes de représentations, des méthodes de traitement des données — soit autant d’étapes susceptibles de déconcerter un utilisateur non averti, voire de le conduire à produire des représentations erronées. Ici, les cartes existent déjà, elles sont sûres, fiables et directement exploitables. L’utilisateur trouvera en revanche une interface de recherche multicritères lui donnant un accès rapide et direct aux cartes recherchées. Mises en ligne sous licence Creative Commons « Paternité », toutes les cartes sont téléchargeables librement au format PDF (idéal pour l’impression) ou JPG (idéal pour les écrans).

Un projet collectif

L’équipe de cartoprodig est composée d’Olivier Ninot (géographe et cartographe, ingénieur de recherche au CNRS), Catherine Valton (cartographe, ingénieure d’études à l’IRD) et Samuel Haroutunian (informaticien, ingénieur d’études à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne). Ils sont rejoints, au sein du comité éditorial, par Antonine Ribardière (maîtresse de conférences, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), Pauline Gluski (ingénieure de recherche, IRD) et Géraud Magrin (professeur, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne). Des stagiaires en formation dans le Master Carthagéo ont participé au développement du projet et à la production de cartes. L’engagement de plusieurs collègues aux statuts et aux appartenances institutionnelles variés est très révélateur du mode de fonctionnement de l’UMR Prodig pour laquelle la diversité des tutelles, des profils et des compétences est perçue comme un atout pour développer des projets. En outre, cartoprodig s’inscrit dans le prolongement de plusieurs actions du laboratoire visant à valoriser l’information géographique sous la forme de productions s’adressant à la communauté scientifique et à un public élargi, comme des atlas.

Un projet évolutif

Lors de sa mise en ligne, le site comptait un peu plus de 400 cartes, traitant pour la majorité de données de taux pour les dernières années (2014 et ultérieures). Cette collection de cartes inaugurale est progressivement complétée et enrichie. D’abord par des cartes traitant des dernières données disponibles et par des séries temporelles où des indicateurs seront traités à plusieurs dates. Les bases de données mobilisées permettent en effet de remonter le temps et de cartographier des indicateurs statistiques, parfois jusqu’aux années 1960. Une fois les fonds de carte ajustés aux époques traitées, les rendus cartographiques des séries temporelles sont particulièrement parlants : on y voit les tendances générales (des cartes qui s’éclaircissent ou s’assombrissent selon la tendance) et l’on peut également suivre l’évolution de l’indicateur en question pour chaque pays. Prochainement, d’autres indicateurs pourront être ajoutés à la liste et d’autres types de données impliquant d’autres formes de représentations cartographiques seront traités (des flux par exemple). Enfin, l’équipe réfléchit déjà à plusieurs pistes pour faire évoluer le site : des cartes par typologies, des graphiques, des fiches synthétiques pour un indicateur ou un thème, des cartes à l’échelle infranationale, etc. Il ne nous reste qu’à les explorer…

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Les emplois dans l’agriculture en Afrique (1999-2019)

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