Sciences de l’Antiquité et de ses réceptions

Retrouvez ici l'ensemble des recherches en sciences de l'Antiquité et de ses réceptions menées à CNRS Sciences humaines & sociales et dans ses laboratoires.

En France, la structuration de ce domaine est ancienne. On parle volontiers de « sciences de l’Antiquité » – on pourrait aussi parler d’« études classiques » même si aucune expression n’est entièrement satisfaisante. Ces expressions recouvrent notamment les formations littéraires (grec et latin), l’archéologie « classique » (Grèce et Rome) et autre (Égypte, Proche et Moyen Orient, Étrusques, Carthage, Celtes, etc.), l’histoire de l’art, la philologie, philosophie. Dans leurs dynamiques actuelles, les recherches menées au CNRS en sciences de l’Antiquité montrent qu’on a affaire à un ensemble de disciplines, de thématiques et de questions évolutives dans le temps (à l’échelle de presque un siècle et demi) et constamment traversées par un enjeu : la détermination de leur périmètre spatial/aréal et temporel et corrélativement de leur objet et de leurs méthodes. Ainsi, au sein du monde gréco-romain, il est devenu peu à peu évident qu’on ne pouvait tenir la partition monde grec/monde romain. Rome est dès l’époque archaïque en contact avec les cités grecques (notamment les cités grecques de Campanie, Cumes, Pithécusses, Naples) ou de Grande Grèce (Tarente, Métaponte) ; Rome s’insère dès le IVe s. av. J.-C. dans le jeu des royaumes hellénistiques, jusqu’à intégrer dans son Empire l’ensemble du monde grec. De ce fait, la partie orientale de l’Empire est à cheval sur l’histoire romaine et l’histoire grecque. En outre, s’est peu à peu imposée l’idée qu’on ne peut s’en tenir à des sciences du seul monde gréco-romain, ou d’une Méditerranée, même élargie. Cette caractéristique a des implications épistémologiques fortes. Aujourd’hui, au CNRS, elle se traduit notamment par un triple mouvement de déplacement :

  • Les frontières spatiales reculent. Aujourd’hui, la ligne de démarcation qui est mise en cause en France est celle qui distingue des travaux sur les aires orientales (Chine, Corée, Japon) et des travaux sur les aires (monde gréco-romain, bassin méditerranéen et Moyen Orient) des sciences de l’Antiquité plus installées.

 

  • Les frontières temporelles évoluent. Si on inclut la réception du corpus antique, ses traductions, ses commentaires, ses usages, ses refontes, le champ des études classiques inclut potentiellement des travaux sur des périodes postérieures (par exemple en philosophie, notamment sur le Moyen Âge et la Renaissance). Il déborde donc les « sciences de l’Antiquité ». Sur le plan temporel, la chose vaut aussi en amont : suivant les dates d’apparition de l’écriture : on tend à considérer comme « antiques » (et donc « historiques ») les civilisations d’Égypte et de Mésopotamie et comme « protohistoriques » les civilisations contemporaines (l’Europe occidentale des mégalithes par exemple). Il conviendrait plutôt de prendre en considération toutes ces aires géographiques à la même période, c’est-à-dire depuis les premières manifestations de structures de pouvoir fort (de type étatique) – qui se manifestent par l’écriture dans certains cas, mais aussi par les constructions mégalithiques dans d’autres, ou dans la symbolique du pouvoir (stèles, etc.), à partir du début de l’Âge du Bronze.

 

  • Les frontières disciplinaires sont mises en question. Les études classiques se démarquent d’une approche disciplinaire pour mêler des spécialités de langue, l’histoire et la géohistoire, l’archéologie, l’archéométrie, l’anthropologie culturelle, etc. L’exemple de figures comme celle de Paul Veyne en France ou de Moses Finley outre-Manche montrent qu’elles ont un rôle moteur dans les rapprochements interdisciplinaires.

 

  • Enfin, on a affaire à un domaine qui, en redéfinissant sans cesse ses frontières spatio-temporelles et donc ses contenus, ses méthodes et ses outils, constitue le lieu par excellence pour la formation d’un regard réflexif historicisé et aréal sur ce qu’une société peut considérer comme sa « culture classique », les moyens de la connaître et de la transmettre, et donc aussi une sorte de miroir pour penser son identité passée, présente et à venir et son lien aux cultures « autres ». En résumé, les études classiques opèrent comme un miroir pour les sociétés.

 

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